DANS LES MONTS DE LACAUNE

Plus de 20°C au niveau du col, sur le coup de 15 h
Plus de 20°C au niveau du col, sur le coup de 15 h

 

 

 

 

 

 

J'y ai aussi acheté du jambon ...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Fort de ma récente prise de sang (à peine un peu au-delà de 200 mg/100 ml de cholestérol total) - on ne parle pas du reste du profil lipidique - c'est vers les hauteurs de l'Hérault et du Tarn que nous sommes allés nous promener hier (samedi), Christine et moi. Je me suis tordu le pied devant une boulangerie de Lacaune, sans entorse heureusement. Des pauvres gens y ont vécu des événements bien pire, entre 1941 et 1944, comme une plaque de marbre le rappelle sur la place devant l'office du tourisme. De manière cynique, je n'ai quand même pas hésité à acheter des cochonailles dans une boucherie-charcuterie qui répond à l'intitulé de "Maison Nègre", pour rester un peu dans le ton. Je n'ai pas osé demander à la patronne, cette esclavagiste, si sa viande (de la coche en fait) était kasher! Je vous rassure, ma plaisanterie de mauvais goût ne traduit en rien l'excellence du jambon et des saucissons ainsi acquis. Pour ceux qui ne le savent pas, les villages de cette région: Fraïsse-sur-Agoût, Lacaune, La Salvetat, situés à moyenne altitude (800 m) au milieu des châtaigniers et des pinèdes, sont réputés pour le séchage des salaisons, l'Aveyron proche et son élevage extensif fournissant une partie des porcs utilisés, en complément à la production locale.

 

Hélas, cette région doit aussi sa renommée au sort cruel fait à toutes sortes de citoyens français et d'étrangers en exil, qui répondaient à la description communiquée par les autorités au maire de Lacaune: "J’ai l’honneur de vous informer que Monsieur le préfet de la région de Toulouse a désigné la station de Lacaune comme centre régional pour recevoir des individus dont les agissements, l’attitude, la nationalité ou la confession constituent des facteurs de mécontentement ou de malaise dans la population."

Déjà en novembre 1941, le gouvernement de Vichy avait décrété que "ces mesures sont applicables aux étrangers et aux Français disposant de ressources et dont les agissements, l’attitude, la nationalité ou la confession, constituent des facteurs de mécontentement et de malaise dans la population, risquant ainsi de troubler l’ordre public."  On les appelait pudiquement des "familles indésirables".

Ceux qui ne disposaient pas de ressources avaient déjà été envoyés à Drancy auparavant et puis ...

 

Il semble que plus de 650 personnes ont été assignées à résidence autour du village jusqu'en 1944. Certaines ont réussi à s'échapper, d'autre ont fait défection en se cachant parmi la frange courageuse de la population ou en prenant le maquis. Malheureusement, des rafles ont également eu lieu et, des noms figurant sur la stèle déjà citée, aucun n'a survécu aux camps de la mort, y compris des enfants de 4 ans. 

 

Un des maquis célèbres, une annexe du maquis de Vabre, s'est organisé dans la forêt en-dessous du Roc de Montalet, où trône une vierge du 19ème siècle qui domine un chemin de croix. Il faut dire qu'il existait là une longue tradition de résistance aux exactions du pouvoir central, depuis la persécution des protestants. Et ce réseau de maquisards s'y est implanté cette fois grâce aux unionistes (réformés) d'une part, et grâce aux éclaireurs de l'armée juive d'autre part.

 

J'étais vaguement au courant de tout cela, sans en connaître le détail. Je vous ai déjà expliqué dans ce blog comment mon histoire personnelle croise intimement celle de cette région. Les grands-parents et la mère d'une famille extrêmement chère au coeur de la mienne - pour ne pas galvauder le terme de meilleurs amis, mais il s'agit de ça en fait - ont fui l'avancée des nazis et ont été ... assignés à résidence là-bas, arrivant in extremis à se cacher et à rejoindre la résistance. Et un ancêtre de Christine, qui habitait non loin de là, a vu son bien incendié et détruit après dénonciation, car il avait rejoint le même maquis. C'est un peu pour cela que Christine est originaire de Saint-Pons, car sa famille est allée ensuite se reloger de ce côté-là du col de Cabarétou.

 

Ces deux groupes d'individus ne se connaissaient évidemment pas et c'est mon "exil" à moi, beaucoup moins historique et dramatique, qui a établi la coïncidence.

 

Quand nous avons visité le site au printemps dernier, un mètre de neige empêchait de rejoindre le sommet. Cette fois, c'est sous un soleil radieux que nous avons atteint le parking et puis, depuis cet emplacement, avons gravi le sentier escarpé qui mène au calvaire. C'était un lieu de pélerinage, suite notamment à une guérison miraculeuse.

 

Dommage que le "Gott mit uns" soit arrivé à largement désacraliser l'endroit.

 

 

 

 

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