MAJOU A COUFFOUR

Fin d'après-midi sur les hauteurs de Chaudes-Aigues
Fin d'après-midi sur les hauteurs de Chaudes-Aigues

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Oh mist rolling in from the sea

My only desire is always to be here ...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Parodiant Lord Paul, j'admets que la perspective de passer le plus clair de son temps sur le petit plateau herbeux qui domine la station balnéaire cantalouse de Chaudes-Aigues puisse attirer le couple de Marie-Aude et Serge Vieira. Ce dernier m'a confirmé ce que la presse auvergnate répète depuis quelque temps: il souhaiterait acquérir le château auprès duquel il a construit sa maison d'habitation, mais surtout le magnifique outil de travail que constitue l'ensemble cuisine- salle de restaurant - chambres d'hôtes du "Serge Vieira".

 

Je vous ai déjà raconté notre rencontre, à la fin de la saison 2009 ou bien dans les premiers jours de la réouverture au printemps 2010: c'était un lundi je crois, jour de relâche à l'époque. Lui arborait bermuda et T-shirt, et était flanqué de son épouse, ainsi que d'un couple d'amis dont le second de "Sergio" (Calderon) en ce temps-là. C'est Marie-Aude elle-même qui a  retenu Majou 2005 - une montagne de grenache bien mûr. Comme l'établissement venait d'ouvrir, que la première étoile n'était pas encore engrangée et que la clientèle à venir n'était pas encore cernée, le chef nous a demandé s'il était possible de "boucher au liège", pour éviter de surprendre les plus traditionnalistes parmi les dîneurs. Lui-même, qui a beaucoup voyagé et vu le monde, ne nie par contre pas les avantages d'une obturation hermétique.

 

Nous avons satisfait cette demande en faisant sauter au canif la capsule en aluminium et en la remplaçant, dans la même bouteille avec la bague-à-vis, par un bouchon supposé de bonne qualité ...  vu le prix élevé que je l'ai payé. Je n'ai aucune expertise personnelle à ce sujet et ai fait confiance à mon fournisseur. Comme les cartons vendus au restaurant ne sont pas censés dormir longtemps en cave - rotation des stocks rapide exigée par les banquiers - je n'étais pas trop inquiet.

 

La première étoile a suivi dans la foulée - lien avec la présence de notre vin à la carte ? (joke) - et, lors de la commande suivante, d'un millésime différent, c'est la patronne elle-même qui nous a dit que la pratique bizarre du remplacement de notre screw-cap n'était plus nécessaire, la réputation du restaurant de Serge suffisant à éliminer les appréhensions possibles des gens moins avertis. Ceci sonna la fin de mes légers doutes quant au bon sens des gastronomes visitant les hauts-lieux de la cuisine française de tradition. Même dans ce pays très attaché aux habitudes et au cérémonial - qui ont parfois du bon d'ailleurs - la préservation de la qualité initiale du vin l'emporte progressivement sur un préjugé sans fondement. Ô, je ne vous dirai pas qu'il n'existe plus de monsieur d'âge mûr voulant impressionner ses (jeunes) invité(e)s par un: "C'est juste bon pour les piquettes à 3 euros" mais ce type de réaction est devenu plutôt une rareté. Et nous, à Majou, sommes prêts à perdre cette clientèle-là, conscients que la bonne garde de nos vins passe avant d'autres considérations.

 

Or donc, près de 10 ans (pas tout à fait) après notre première dégustation, suivie de plein d'autres en compagnie de Marie-Aude et de ses apprentis-sommeliers, ou chefs-sommeliers, successifs, nous avons eu la chance de réaliser la dernière hier, rencontrant par la même occasion Jean-François Lemoine, qui officie dans cette table d'Auvergne à présent doublement macaronnée, après avoir pas mal bourlingué dans le vignoble mondial et avoir servi dans de très beaux établissements de la capitale française. Je ne suis pas un ursipellivendeur - le néologisme est de moi - mais certaines cuvées inédites (rares) de notre production ont semblé plaire. A suivre sur la carte, peut-être ...

 

Ce n'est pas tout. Mon anniversaire a lieu en octobre et mes amis les plus proches - ainsi que mon frérot chéri dont l'état neurologique évolue de manière favorable depuis une grosse semaine après son accident récent, ouf - sont venus me faire la fête à cette époque. Mais notre petit anniv' à nous, en tête-à-tête avec Christine, avait dû être reporté. Elle m'a fait la douce surprise de me convier au menu "M" avec vins de circonstance, choisis par la maison, en guise de compensation.

 

Vous savez que je refuse l'exercice de "critique gastronomique" - les vrais sont presque tous des fats et des ignares, même si certains sont quand même des gourmets; ça, je suis prêt à l'admettre - mais je m'autorise à vous renvoyer au lien, d'une part, et à vous vanter l'excellence du pigeon (de chez Jean-Claude Miéral si j'ai bien saisi) d'autre part. Bon, entendu, c'est une de mes viandes préférées, avec la biche, l'araignée d'Aubrac ou de Salers et le ris de veau mais quand même: la peau était rissolée et croquante, le centre du filet était encore presque froid et le reste de la chair, à peine tiède, bien juteuse: du grand travail de rôtisseur! En outre, une aumônière de betterave rouge crevait le palais tellement c'était bon (terreux et acidulé!). Tiens, j'aurais bien pris une repasse ...

 

La cuisine du meilleur élève du chef Marcon (attention à ne pas inverser des lettres) est faite, depuis que j'ai eu la chance de la découvrir (troisième fois), sur la même base. Elle est sans esbrouffe. Je ne pense pas qu'il cèdera à la pyrotechnie et au "farfelu pour le farfelu". J'espère qu'il ne sera pas obligé de vous servir des Oeufs d'esturgeon de la rive droite du Petit Rhône transportés sur le dos de l'ânesse Modestine dans un coffret isotherme dessiné par Philippe Starck, Sonia Rykiel ou Pénélope Fillon (nouveau job) pour monter d'un cran encore dans la hiérarchie de Bibendum. Serge Vieira fait du Serge Vieira, avec des produits de grande qualité et peu exotiques (sauf l'huître ou la marée, difficiles à obtenir dans la Truyère ou le Lot).

 

Moi, ça me convient ainsi.

Quand mes petits camarades de cellule m'auront nommé trésorier de notre section au Parti,

je voterai par un centralisme démocratique d'ouverture et de renouveau

une "aide au développement d'une gastronomie élitiste pour tous"

qui consistera à réserver pour votre Léon une table hebdomadaire à Couffour.

Da! 

 

 

 

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