"FART", VRAIMENT "FART"

Les plaisirs de la table, indeed
Les plaisirs de la table, indeed

 

 

 

 

 

 

Je vous avais montré 

la Mina tout sourire

avec son camarade Jeff

... à table.

 

 

 

 

 

 

Cette fois, ce n'est pas à la bonne table de Stéphane Lefebvre et Laetitia, servie par sa propre petite-fille, que j'ai emmené ma mère, en plein coeur de la paysanne Hesbaye. Non, je lui ai fait la surprise d'aller déjeuner chez Erwan et Pamela Houssin, presque en pleine mer, au-dessus de la falaise de Leucate la marine. Et le résultat est le même: des sourires.

 

Dans notre famille, nous ne sommes pas sous-nourris et la table est surtout une occasion de se donner du plaisir, un peu trop même parfois. Christine me fait le reproche, entre autres, d'avoir du mal à reperdre les kilos que mon mode de vie lui ont fait prendre ... affirme-t-elle. Moi je dis que c'est la félicité de vivre aux côtés d'un être aussi adorable que moi qui lui donne des petites rondeurs. "Qui s'épanouit dîne", prétend le proverbe.

 

En catalan normatif, estar fart signifie souvent "en avoir marre", "ne pas en supporter plus". Dans la plaine du Roussillon, l'expression prend facilement l'acception "d'être repu", "d'en avoir plein la panse" avec une nuance de bien-être. C'est je pense  la cinquième fois que nous avons la chance de déguster les menus du Grand Cap depuis sa réouverture à l'automne 2016. A chaque occasion, je ressors avec la même impression: un bonheur comblé. En fait, vous y faites deux repas: le salé d'abord, et l'ensemble des douceurs ensuite (pré-dessert, dessert, petites bouchées et enfin mignardises sur le chariot). Il faudrait prévenir la clientèle: un deuxième pancréas, en bon état, est indispensable. Moi qui n'en possède plus qu'un tout rikiki, je mets double dose d'insuline, avant et après. Malgré tout le respect que je porte aux diabétologues, à ces moments-là, ils peuvent aller se faire voir. 

 

Pourtant, paradoxe, chaque assiette ne vous bourre pas. Elle vous rassasie, très précisément. Mais l'accumulation de ces délices finit par faire un repas d'honnête homme. Une seule exception à ce jour: ma mère avait retenu du chevreuil (de chasse française) et c'est un généreux tronçon de filet, en plein dos*, qui lui fut servi en trois morceaux snackés, avec une garniture d'automne incroyablement soignée. Attention, je ne boude pas la gelée d'airelles, pommes au four, forestière, accompagnée de sauce Grand Veneur ou d'une Cumberland, mais je n'ai pas besoin d'un chef étoilé pour cela: on le fait à la maison. Notez bien qu'elle en est venue à bout ...malgré son appétit déclinant, dit-elle. 

 

Christine et moi en étions restés au turbot, cuisson lente et fumet de bonite par au-dessus, au goût affirmé avec en plus la touche d'agrumes d'une main de Bouddha. C'est ainsi que j'accumule du kharma, moi. 

 

En entrée, même si je ne vous en parle qu'après - "Faut suivre, coco !" - l'araignée de mer en effiloché est un met exquis, à la fois raffiné et fort en goût. Le Kamchatka ou bien Terre-Neuve ont comblé la Coxydoise et notre Cévenole. Moi, j'ai osé l'oursin de Galice tempéré par du cresson et sa mouillette recouverte de ces petits oeufs de poisson volant qui croquent sous la molaire comme un clavecin sous les doigts de Keith Jarrett. Relisez la phrase, il y a une tentative d'humour.  L'iode (ou plutôt le soufre marin et les dérivés aminés) ne domine pas.

 

Pour rester dans le bain ("Oh Marie, si tu savais ..."  chantait jadis un récent disparu), nous avons jeté notre dévolu sur le blanc de la Rouquette-sur-Mer, la Clape méritant nos applaudissements (ici: rire). 

 

Verdict de la douairière: "Quel endroit sensationnel, tout est délicieux, le cadre est magnifique et le chef est un bel homme. Mais il devrait se raser de plus près ...". Vous n'oubliez pas que feu mon père (cheveux châtains, teint clair d'Eburon ou d'Aduatique) portait moustache et poil court. Ma mère n'est pas habituée aux Méridionaux à la barbe dure et noire, presque bleutée comme de l'acier trempé, dont la coquetterie de macho moderne consiste à lui laisser quelques millimètres, à mi-chemin entre un hidalgo castillan, un Gitan ténébreux venu de son lointain Punjab pour parcourir la Camargue et les allées Pierre-Paul Riquet, ou encore un fier Gascon élevé au "pousse-rapière". 

 

Elle m'a fait promettre de revenir lors de son prochain séjour chez nous.

Voilà un serment que je n'aurai pas trop de mal à tenir!

 

 

*: il s'agit en fait de ce qu'on appelle parfois le "dos", l'équivalent du filet mignon, la partie sagittale des muscles ilio-spinaux.

    Avec la "selle", c'est le meilleur morceau de ce gibier.

 

 

 

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